Si, sur le plan technique, le déroulement de l’accouchement ne diffère guère d’un accouchement ordinaire, il en va tout autrement sur le plan psychologique.
En cas de grande prématurité, vous accoucherez par césarienne pour éviter à votre bébé si fragile, l’épreuve d’un accouchement par voies basses.
C’est un bébé inachevé que vous mettez au monde et qui nécessite une prise en charge immédiate par le pédiatre. Dans le meilleur des cas, vous serez séparés quelques jours, dans le pire des cas, un décès ou des heures ou journées insoutenables pendant lesquelles vous attendrez le diagnostic. Autour de vous, le monde s’était arrêté de tourner et seule compte la santé de votre bébé.
A peine sorti de ventre, pas le temps de faire connaissance, de s’attendrir et de verser des larmes de joie, votre bébé est généralement intubé et placé en couveuse afin de préserver sa chaleur nécessaire à sa survie et de le maintenir à l’écart de tout microbe. Il devra continuer sa croissance dans un univers artificiel le temps que ses différents organes arrivent à maturité.
Habituez-vous à l’image d’un bébé bien différente de celle de l’enfant imaginaire, un bébé miniature, bardé de tuyaux et perfusé, avec une peau très rouge assez fine, que vous ne pourrez pas bercer ni dorloter à souhait. Si votre bébé est un grand prématuré, vous devrez vous familiariser avec les mille et un rituels d’un service d’urgence. Vous pourrez seulement lui rendre visite habillée d’une blouse stérile, les mains désinfectées, coiffée d’une charlotte et parfois d’un masque.
Mais une fois le choc passé, votre bébé sera bercé, à travers sa couveuse, par votre regard fou d’amour. Vous apprendrez vite à décoder ses mimiques, comprendre ses besoins de repos et ses besoins de communiquer avec vous. Et puis viendra ce moment merveilleux qu’est le premier contact de peau à peau, puis celui où votre bébé s’endormira dans vos bras, son premier bain. Jour après jours, ces rituels vous apprendront à avoir confiance en vous, en votre bébé et à avoir un projet commun afin que vous ne soyez pas trop déroutée quand viendra le jour de rentrer à la maison.
Si vous avez décidé d'allaiter votre bébé, la séparation n‘est pas un obstacle. Vous pouvez utiliser un tire-lait pour donner votre lait si précieux et riches en agents anti-infectieux à votre bébé. Vous lui fournissez ainsi les anticorps dont il a besoin pour se défendre et les acides gras et protéines adaptés à sa croissance. Votre lait constitue la meilleure des protections pour votre bébé prématuré parce que la composition du lait varie selon le terme de la grossesse, votre lait sera adapté aux besoins de votre bébé prématuré et si fragile.
Lors de naissances prématurées, la mère peut, dans les jours qui suivent la naissance, vivre deux processus montrant son désarroi : la confusion existentielle et la maternité blanche , qui sont compensés par des mécanismes de défense différents.
Le syndrome de confusion existentielle est décrit comme un sentiment de flou, de vide, un malaise indéfinissable, qui s’accompagne d’une certaine désorientation et d’une perte relative du sens de la réalité. La mère peut se plaindre de douleurs diffuses (céphalées, douleurs abdominales, ...). Les premiers contacts corporels qu’elle aura avec son enfant pourront atténuer cette réaction.
est une autre réaction où la mère ne semble pas souffrir de l’absence de l’enfant, elle s’adapte d’emblée à l’absence de son bébé, elle est peu inquiète et demande peu d’informations à son sujet. Elle a peu d’affects à son égard. Il s’agirait d’une pseudo-normalité, d’une fuite vers la santé, comme défense contre l’angoisse qu’elle ressent face à son bébé prématuré. La difficulté est alors le retour à la maison, où elle va nécessairement entrer en contact avec lui, avoir enfin une relation qu’elle avait dénié jusqu’alors. La mère est alors susceptible de découvrir, à retardement, l’angoisse et la dépression, qui risquent d’être plus profondes puisqu’elles ont été refoulées au moment “voulu”. Il se peut aussi qu’elle rationalise les soins qu’elle apporte à son bébé, se comportant davantage comme une éducatrice qu’une mère, n’investissant toujours pas de relation affective avec celui-ci. Dans les deux cas, les conséquences sont à craindre.
Le deuil anticipé est une réaction qui peut se marquer au niveau des parents, qui, connaissant les risques éventuels de mortalité et de séquelles pouvant atteindre leur enfant, anticipent la mort éventuelle de celui-ci. En conséquence, une image d’enfant vulnérable peut lui coller à la peau. L’enfant ne peut alors se séparer rapidement de sa mère, il se comporte de manière régressive ou bien au contraire, il s’expose à tous les dangers. Des plaintes hypocondriaques et des difficultés scolaires sont alors à craindre. Il garde cette image d’enfant fragile, comme si la menace de la perte allait toujours exister.